La réduction des stocks est un poste d’optimisation du cash souvent envisagé mais rarement mis en œuvre en raison de la difficulté d’une évaluation rationnelle des potentiels de réduction et de la mise en œuvre des programmes d’optimisation. Néanmoins, les résultats le prouvent, l’établissement d’un diagnostic précis et rapide permet de développer un plan d’action opérationnel, dont les résultats s’élèvent à 10 à 15 % de réduction de la valeur de stock en moyenne.
Avant de mentionner les axes possibles d’amélioration, il s’agit
tout d’abord de comprendre ce qui oblige les entreprises à faire du
stock. En mettant de côté les aspects spéculatifs et stratégiques
(opportunités d’achat, sécurisation des approvisionnements en cas de
pénurie), pour se focaliser uniquement sur les aspects opérationnels, le
but du stock est de couvrir les aléas afin de garantir un haut niveau
de service à ses clients.
Un diagnostic à la fois des systèmes de gestion et une analyse détaillée article par article permettront d’identifier des actions opérationnelles à court et moyen terme pour réduire le niveau de stock sans dégrader le taux de service, voire dans la plupart des cas l’améliorer.
1. Identifier les stocks dormants
Dans le cadre de l’analyse des stocks dormants, on distingue ainsi les stocks dit « morts », c'est-à-dire sans consommation sur une période significative de l’activité de l’entreprise (généralement sur un cycle d’un an), et les stocks dit « à risque », c'est-à-dire possédant un niveau de stock élevé avec une faible consommation et donc susceptibles d’impacter durablement le niveau de BFR.
L’identification de ces stocks pour les entreprises disposant de système d’information intégré est relativement simple et doit permettre d’envisager, dans le cadre d’une analyse détaillée par les opérationnels, les solutions de déstockage et/ou de revente. La première de ces solutions est ainsi de s’assurer que l’approvisionnement de ces articles est stoppé ou dans le cas contraire qu’il est justifié.
Cette analyse des stocks dormants doit également permettre de comprendre les mécanismes qui ont généré ce type de stock, de définir les actions correctrices pour y remédier et éviter que ce stock ne se reconstitue de façon récurrente. Cela nécessitera donc de mettre en place des indicateurs réguliers de suivi qui permettront de détecter les futurs stocks dormants potentiels.
2. Définir une politique de stock optimale prenant en compte les divers aléas, tout en intégrant les quantités économiques de commandes et de production
Une autre possibilité d’évaluation rapide de potentiels de réduction des stocks concerne l’optimisation des paramètres de gestion des articles achetés. Cela s’inscrit dans le cadre d’une démarche structurée d’optimisation du BFR sans dégrader le taux de service client.
Cette démarche s’appuie sur une classification des articles sur des critères de consommation et de prix permettant de définir selon la classe :
- des taux de service impactant le niveau des stocks de sécurité et
- des objectifs de couverture de stock impactant les quantités de commandes.
Cette classification a ainsi pour objectif de porter une attention particulière aux articles qui impactent significativement le niveau de stock et ainsi d’adapter des règles de gestion pour chaque groupe.
Les paramètres de gestion sont évalués au niveau de l’article en fonction de leur impact sur le niveau de stock et sur la satisfaction Client, mais également en tenant compte des coûts engendrés par la gestion des stocks (Coût de possession et coût de passation de commandes). Il est d’ailleurs assez fréquent de constater que cette analyse amène le redimensionnement du stock de certains articles à la hausse dans le but d’améliorer le taux de service Client.
La détermination d’objectifs de couverture de stock permet un pilotage plus efficace du niveau de stock et la définition d’objectifs de réduction plus précis. Il est à noter que cette segmentation des articles utilisée dans le cadre du diagnostic sera facilement transposable dans le cadre d’une mise en application opérationnelle.
Sur la base du stock de sécurité et des quantités de commandes ainsi estimés, il est alors possible de comparer un stock optimal au niveau de stock moyen sur une période significative, de constater les écarts et ainsi d’évaluer les potentiels de réduction.
3. Analyser les causes fondamentales des aléas de la supply chain
La variabilité rencontrée à travers la supply chain (des ventes, à la production, aux approvisionnements, sans oublier le maillon logistique) oblige l’entreprise à augmenter son niveau de stock, afin de maintenir un haut niveau de service à ses clients.
Parmi les causes générant cette variabilité, on notera :
- L’absence de système de gestion des prévisions de vente
- Des problèmes de performance des fournisseurs tant sur le niveau de service que sur la qualité des produits
- L’absence de contrat de service avec les clients, notamment sur les engagements standardisant les délais de commande
- Un outil de production peu fiable
- L’inexactitude récurrente des stocks
Pour traiter ces différentes causes, un plan d’action impliquant les opérationnels sera mis en oeuvre afin de réduire les aléas. L’objectif est de réduire les stocks sans impacter le taux de service.
Suite à cette approche opérationnelle, des actions à plus long terme, stratégiques et structurantes peuvent être étudiées pour réduire davantage la valeur de stock:
1. Revoir la stratégie industrielle et les process de production,
2. Revoir la stratégie d’achat en intégrant le « total cost of ownership » dans les décisions d’achat,
3. Mettre en place une démarche de différentiation retardée du produit,
4. Refondre la stratégie de distribution, nombre et emplacement des entrepôts et plateforme logistique.
L’évaluation financière des gains sous forme de diagnostic est une étape préalable nécessaire à la mise en œuvre d’un plan de réduction des stocks. C’est le moyen le plus efficace pour convaincre les différents acteurs des processus impactant les stocks de mener à bien ce plan. Cette démarche est d’autant plus intéressante qu’elle s’inscrit dans un premier temps dans le cadre d’un diagnostic rapide qui sera directement utilisable de façon opérationnelle dans une phase de déploiement et ceci sans investissement massif (en coût et en ressources) de la part de la société.
Par Frédéric Lumeau, Director, Duff & Phelps